S'embarquer dans d'autres mondes ... c'est aussi l'objectif d'une photo ou d'une toile : s'évader!
C'est souvent lorsque l'on "tient" une idée que l'on commence à la mettre sur papier, en gribouillant rapidement un croquis, ou en allant directement sur la toile, préparer ses couleurs et foncer.
Peindre, c'est un peu comme accompagner un patient dans un travail thérapeutique : on voyage avec lui, on s'embarque avec lui ou elle et on se laisse porter, sentir. Peindre des paysages, essayer de toucher l'autre par la couleur, l'air, l'eau, le vent. Probablement s'agit-il aussi d'un travail de mémoire, de résurgence, une histoire du temps.
On compare l'esprit à un "singe captif" qui s'agite tant et si bien qu'il s'entrave lui-même et se trouve incapable de défaire ses propres chaînes. Penser est une fonction, être est un état.
Lorsque nous donnons des crayons de couleur et une feuille à un petit enfant, il se met spontanément à tracer des lignes et c'est magique : sa main trace quelque chose pour lui et cela vient du plus profond de lui-même. A 15 mois, il ne peut pas encore nommer ce qu'il dessine, cela viendra plus tard.
Au paléolithique supérieur, il y a environ quinze mille ans, le mammouth de la frise noire du Pech Merle est prétexte à un jeu de traces qui ressemble fort à celles de nos bébés. Cela nous emmène très loin...
Le processus de symbolisation est le même dans toutes les cultures et pour toutes les races parce qu'il s'appuie sur le vécu corporel, pré et post natal. Wassili Kandinsky parle "d'immense force inconsciente" qui se manifeste dans les dessins d'enfants, n'hésitant pas à mettre leur création sur le même plan que des artistes modernes. J'aime y songer lorsque je me laisse en embarquer dans les "dessins" des mes petits enfants, dans ces autres mondes... Cela a un petit goût d'éternité!